Vers un espace éco-responsable
Le moins que l’on puisse dire est que l’humain n’est pas tendre avec sa planète. D’aucuns craignent qu’il en soit un jour de même avec notre environnement spatial. Et misent sur l’innovation pour le préserver. C’est le cas de Sabrina Andiappane, responsable des nouvelles initiatives Business et des projets robotiques spatiaux chez Thales Alenia Space.
Commençons par un constat : les satellites nous accompagnent à chaque instant dans notre vie quotidienne.
Les bénéfices directs que nous apportent les satellites sont évidents : ils nous permettent de prévoir le temps qu’il va faire, de nous repérer dans nos déplacements et de communiquer entre nous à toute heure du jour et de la nuit, pratiquement partout sur notre planète.
On l’oublie souvent mais les satellites permettent aussi de sauver des vies, au sens propre. Ainsi, en cas de catastrophe naturelle, lorsque toutes les infrastructures de télécommunications terrestres sont dévastées, ce sont eux qui prennent le relais. Ils constituent également des atouts technologiques indispensables pour étudier les changements du climat, surveiller notre environnement et contribuer ainsi à la préservation de notre planète.
On ne peut plus concevoir notre vie quotidienne sans les satellites. Et les possibilités qu’ils offrent ont fait qu’ils se sont multipliés. Depuis 1957 et le début de l’ère spatiale, de nombreux lanceurs, satellites et instruments divers ont été lancées dans l’espace. On dénombre aujourd’hui 5 400 satellites autour de la Terre. Et plus de 10 000 devraient être lancés ces dix prochaines années. Cela va forcément générer des débris spatiaux à moyen et long terme.
Que peut-on faire ?
En premier lieu, il existe des directives et des normes internationales pour une utilisation plus durable de l’espace. Il s’agit, par exemple, de concevoir les lanceurs et les véhicules spatiaux pour qu’ils limitent la perte d’éléments, tant au décollage que pendant leur exploitation. Et lorsque les satellites arrivent en fin de vie opérationnelle, il est possible de les désorbiter pour les envoyer vers une orbite cimetière.
Chez Thales Alenia Space, nous travaillons sur le développement de véhicules dédiés à ce qu’on appelle dans notre jargon l’On-orbit Servicing. Ces véhicules auront la capacité d’accomplir un grand nombre de tâches directement en orbite telles que l’inspection, l’extension de la vie opérationnelle d’un satellite, son ravitaillement en carburant, des tâches de maintenance et de réparation ainsi que la désorbitation de débris spatiaux.
Il existe parallèlement des projets intéressants pour « nettoyer » l’espace comme le projet ClearSpace-1, de l’Agence spatiale européenne1. Fort de notre expérience acquise sur les projets européens H2020 I3DS, EROSS et à présent EROSS+, nous avons, chez Thales Alenia Space, imaginé une autre solution, préventive, fondée sur la maintenance en orbite.
Un satellite a une durée de vie d’en moyenne cinq à quinze ans, suivant sa mission. Mais si quelque chose lui arrive pendant qu’il est en service (épuisement des batteries ou des ergols2, par exemple), pas question d’envoyer un astronaute pour le réparer. Vous imaginez le coût et, surtout, le risque encouru ! Donc, que faire dans ce cas ? Eh bien, notre idée, c’est que comme sur Terre, vous appellerez le service client !
Concrètement, comment ça marche ?
Imaginez que vous disposez d’un véhicule spatial très particulier équipé de dispositifs robotiques comme un bras, une pince et bien d’autres outils. Après avoir examiné l’environnement du satellite, il fixera un rendez-vous pour s’y amarrer et effectuer les tâches que vous lui aurez demandées : entretien, ravitaillement en carburant, réparation ou mise à jour.
Grâce à ce type d’assistant robotique, nous pourrons allonger la durée de vie opérationnelle du satellite et, donc, retarder le moment où il faudra le remplacer. L’on pourra également déplacer les satellites en fin de vie, soit pour les orienter vers une orbite cimetière, soit pour les diriger vers la Terre où ils se désintègreront lors de la phase de rentrée atmosphérique.
Mais ce n’est encore que de la science-fiction ?
Détrompez-vous. Depuis plus de quinze ans déjà, Thales Alenia Space étudie des solutions pour permettre des missions robotiques innovantes qu’elle va mettre en œuvre dans ces prochains projets.
Par exemple ?
Nous développons actuellement un système de ravitaillement en orbite unique en Europe, dans le cadre du programme Esprit qui est un des modules de la future station spatiale autour de la Lune, Lunar Gateway, qui a démarré en 20203. Ce nouveau système est essentiel car le carburant est la première raison de fin de vie d’un satellite alors que le reste du système reste toujours fonctionnel.
Pouvez-vous nous parler de Space Rider ?
En 2020, Thales Alenia Space, avec notre partenaire italien Avio, a signé un contrat avec l’Agence spatiale européenne pour développer un système de transport automatisé et réutilisable baptisé Space Rider4.
Space Rider permettra à l’Europe de disposer de son propre système de transport spatial entièrement autonome, compétitif, et réutilisable pour des missions non habitées et un accès « aller-retour » régulier à l’orbite basse. Il sera utilisé pour transporter une variété de charges utiles sur différentes altitudes et inclinaisons en orbite basse. Il contribuera, à titre d’exemple, à rapporter sur Terre des éléments à recycler pour un prochain lancement.
Avez-vous d’autres projets innovants en préparation ?
Oui. Par exemple, nous préparons en parallèle une mission de démonstration des futurs services en orbite pour faire voler son véhicule robotique START (Servicer for Transportation And Robotic OperaTions) à la suite des projets EROSS et EROSS+. Le projet EROSS a déjà validé au sol les technologies clés pour permettre ces futures missions robotiques.
Des missions telles que Space Rider ou notre offre d’On-orbit Servicing sont représentatives de la vision de notre entreprise : Space for Life. L’Espace doit en effet être perçu comme un levier technologique extraordinaire à même d’apporter à l’humanité une vie meilleure et durable et un avenir de confiance sur Terre. C’est notre intime conviction.
Pour en savoir plus sur ce solutions innovantes en vidéo : On-Orbit Servicing
1 ClearSpace-1 est un satellite chasseur conçu par une start-up issue de l’École polytechnique fédérale de Lausanne qui devrait être lancé en 2025. Objectif de la mission : capturer et désorbiter un débris orbital pour ensuite le faire brûler dans l’atmosphère.
2 Constituant, soit comburant, soit combustible, d'un propergol, le mélange apte à fournir par réaction chimique l'énergie de propulsion d'un moteur-fusée.
3 Thales Alenia Space est, par ailleurs, un partenaire majeur de la station spatiale cislunaire, comme maître d’œuvre de deux composantes clé pour le compte de l’Agence spatiale européenne, Esprit et I-HAB, et comme fournisseur du module pressurisé HALO pour le compte de Northrop Grumman.